Petite philosophie pour le loup et l’agneau

Compte-rendu de lecture
 
  • lundi 24 juillet 2006.
  • Un livre de Pascal Cauquais aux éditions Milan, dans la collection Pause Philo.

    Un livre passionnant, qui sur la métaphore du loup et de l’agneau, essentiellement traitée par La Fontaine, disserte sur les rapports entre idéalisme et réalisme.

    Les idéalistes sont bien sûr les agneaux, mais une des questions est de savoir s’ils le sont parce que faibles, n’ont aucune autre ressource, ou bien s’agit-il d’un idéalisme de la raison ?

    Les réalistes, assimilés aux cyniques de l’antiquité, voient les choses comme elles sont et non comme les idéalistes le voudraient. Les réalistes animés par une « éthique de la puissance » façonnent le monde à leurs besoins, ce qui leur permet ensuite de le vouloir tel qu’il est.

    La métaphore permet également de comprendre comment fonctionne l’ordre du monde. Les loups et les puissants sont moins nombreux que les moutons, lesquels sont plus dociles.Et c’est au fond, sur cette docilité que tient tout le système. Car si les idéalistes forts de leur nombre réagissent, ils ont des moyens dont doivent tenir compte les loups qui comptaient bien les croquer.

    L’auteur cherche à proposer une troisième voie que cet affrontement stérile. C’est ce qu’il appelle l’idéalisme réaliste qui peut quelque fois rejoindre le réalisme pragmatique. C’est ce qu’a fait le mouvement antimondialiste qui a fait des propositions concrètes et est ainsi devenu altermondialiste.

    Le livre balaye les thèmes de l’écologie, de la politique, de la géopolitique, de l’économie et de la finance, avec une mention particulière pour le développement durable, sur un mode qui rend le lecteur intelligent. C’est un livre émaillé de citations et références philosophiques et historiques.


    Quelques unes de ces citations :

    « Dans l’esprit des lois de Montesquieu : « Les lois sont comme les toiles d’araignées : elles arrêtent les mouches, mais les oiseaux passent au travers. »

    Comme en témoigne cet extrait des Pensées : « La justice sans la force est impuissante ; la force sans la justice est tyrannique. La justice sans force est contredite, parce qu’il y a toujours des méchants ; la force sans la justice est accusée. Il faut donc mettre ensemble la justice et la force ; et pour cela faire que ce qui est juste soit fort, ou que ce qui est fort soit juste. » On ne peut mieux dire.

    Suite du fragment des Pensées précédemment évoqué : « Ainsi on n’a pu donner la force à la justice, parce que la force a contredit la justice et dit qu’elle était injuste, et a dit que c’était elle qui était juste. Et ainsi ne pouvant faire que ce qui est juste fût fort, on a fait que ce qui est fort fût juste. »

    C’est dire que si la paix est éthiquement supérieure à la guerre (« La paix est fort bonne de soi », concède La Fontaine), car ses bienfaits permettent l’épanouissement des potentialités humaines, la guerre est ontologiquement supérieure à la paix alors qu’il faut être deux pour instaurer la paix, un seul suffit à déclencher la guerre.


    Pour conclure, l’auteur met en exergue cet aphorisme : « le loup habitera avec l’agneau » (Esaïe, 11, 6). Il cite également cette phrase du même texte : « le loup et les brebis brouterons ensemble. » On pourrait ajouter sur un mode fantaisiste : « le loup et l’agneau dormiront ensemble, mais l’agneau ne dormira pas beaucoup. »

    Un article du site : Pour une médecine écologique
    https://medecine-ecologique.info/article.php3?id_article=44